Pour qui veut retrouver dans la capitale la trace des Misérables, la tâche n’est pas aisée. Les aménagements des Halles à partir des années 1850 et de l’emplacement du centre Pompidou dans les années 1930 et 1970, en ont bien modifié les principaux décors.
En effet, si le roman promène son lecteur dans toute la capitale entre les années 1820 et 1830, ses derniers moments se déroulent au coeur de Paris, pendant l’insurrection républicaine de juin 1832 et, ensuite, rue des Filles-du-Calvaire où Marius et Cosette couleront des jours heureux.
Voici les principaux lieux du récit :
Entre 1812 et les années 1840, un éléphant de bois et de plâtre de vingt-quatre mètres de haut trône au milieu de la place de la Bastille. Faute de budget, il ne deviendra jamais l’éléphant de marbre dont Napoléon voulait faire l’emblème de la force et de la douceur du peuple français. Un fait divers (la découverte qu’un jeune garçon y avait élu domicile) donne à Hugo l’idée d’en faire la maison de Gavroche.
Le 6 rue des Filles-du-Calvaire, est l’adresse du riche bourgeois M. Gillenormand, grand-père de Marius Pontmercy. Marius, étudiant, fils d’un colonel disparu à Waterloo, se rallie au socialisme en découvrant la misère du peuple. Il tombera amoureux de Cosette.
Le soir du 5 juin 1832 (première journée d’émeute), depuis la rue Plumet [1], Marius rejoint la barricade de la rue de la Chanvrerie. Grâce à Jean Valjean, il en sortira vivant. C’est 6 rue des Filles-du-Calvaire qu’il s’installera avec Cosette, devenue sa femme.
La famille Hugo n’emménage 6 place des Vosges (à l’époque place Royale) qu’en octobre 1832. L’écrivain se rapproche ainsi du faubourg Saint-Antoine, le terrain d’observation d’où germeront entre 1845 environ et 1862 Les Misérables.
Au 11 rue Sévigné se trouvait un pan de mur du chemin de ronde de la prison de la Force, d’où s’échappe Thénardier, le tuteur de Cosette, après son arrestation par Javert pour tentative d’homicide (un autre pan de mur, de la prison elle-même cette fois, s’avance dans la rue Pavée à droite de l’hôtel de Lamoignon, 24 rue Pavée).
Le 16 février 1833, Cosette épouse Marius à l’église Saint-Paul-Saint-Louis, rue Saint-Antoine. Ici-même, la fille d’Hugo, Léopoldine épouse Charles Vacquerie le 15 février 1843. A gauche et à droite de l’entrée sont encore accrochés les deux bénitiers offerts par Hugo pour l’occasion.
L’insurgé Courfeyrac habite 16 rue de la Verrerie. Courfeyrac emménage ici « pour des raisons politiques ; ce quartier était de ceux où l’insurrection s’installait volontiers. » Marius, obligé de changer d’adresse après avoir été mêlé à l’arrestation de Thénardier par Javert à la maison Gorbeau [2], demande l’hospitalité à Courfeyrac.
Au moment de l’insurrection, Jean Valjean, le protecteur de Cosette, demeure avec elle 7 rue de L’homme armé (partie actuelle de la rue des Archives s’étendant entre la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie et la rue des Blancs-Manteaux - voir la plaque au n°40). C’est un appartement qu’il a commencé à louer en même temps que la maison de la rue Plumet et qu’un autre appartement rue de l’Ouest, pour naviguer de l’un à l’autre sans éveiller de soupçons du voisinage ou de la police.
Le soir du 5 juin, pour l’éloigner du danger, Marius charge Gavroche d’aller remettre rue de L’homme armé un message pour Cosette. Il revient ensuite à la barricade de la rue de la Chanvrerie en en profitant pour jouer quelques mauvais tours sur son trajet : rue du Chaume (aujourd’hui portion de la rue des Archives située entre les rues Rambuteau et des Haudriettes), rue des Vieilles-Haudriettes (rue des Haudriettes) et rue des Enfants rouges (portion de la rue des Archives située entre la rue pastourelle et la rue Portefoin).
Peu de temps après les journées de juin, l’inspecteur Javert se suicide en se jetant dans la Seine, à l’angle du pont Notre-Dame, côté rive droite. Une partie de sa vie a été consacrée à la poursuite de Jean Valjean, qu’il est allé retrouver le 5 juin rue de la Chanvrerie. Valjean lui a alors laissé la vie sauve alors que les insurgés avaient reconnu Javert et voulaient l’exécuter. Javert, pris de remords, se tue pour mettre fin à la traque de Valjean.
Entre l’emplacement de la sortie de métro « Halles » située rue Rambuteau et l’embouchure de la rue Mondétour se trouve en 1832 le cabaret de Corinthe, autre lieu de réunion des membres de l’ABC (voir ci-dessous), que les circonstances vont rendre illustre. En effet, c’est autour du cabaret qu’Hugo imagine la construction des deux barricades de la rue de la Chanvrerie (qui ont peut-être réellement existé, nul ne le sait, mais qui n’ont certainement pas résisté aussi longtemps qu’Hugo le décrit).
« Le passant qui s’engageait de la rue Saint-Denis dans la rue de la Chanvrerie la voyait peu à peu se rétrécir devant lui, comme s’il fût entré dans un entonnoir allongé. Au bout de la rue, qui était fort courte, il trouvait le passage barré du côté des halles par une haute rangée de maisons, et il se fût cru dans un cul-de-sac, s’il n’eût aperçu à droite et à gauche deux tranchées noires par où il pouvait s’échapper. C’était la rue Mondétour, laquelle allait rejoindre d’un côté la rue des Prêcheurs, de l’autre la rue du Cygne et la Petite-Truanderie. Au fond de cette espèce de cul-de-sac, à l’angle de la tranchée de droite, on remarquait une maison moins élevée que les autres et formant une sorte de cap sur la rue. C’est dans cette maison, de deux étages seulement, qu’était allègrement installé depuis trois cents ans un cabaret illustre. […] Maintenant, deux barricades se construisaient en même temps, toutes deux appuyées à la maison de Corinthe et faisant équerre ; la plus grande fermait la rue de la Chanvrerie, l’autre fermait la rue Mondétour du côté de la rue du Cygne. » [3]
Redisons-le, il n’est pas aisé de se repérer dans le dédale des rues actuelles. La rue Rambuteau a été construite en 1838-39 et, entre la rue Saint-Denis et la rue Mondétour, a pris la place de la rue de la Chanverrerie, qu’Hugo préfère nommer Chanvrerie. Gavroche est fauché par des balles alors qu’il ramasse des munitions devant la barricade principale de la rue de la Chanvrerie.
« Les Amis de l’ABC », société ayant officiellement pour but l’éducation des enfants, est en réalité une société secrète qui se réunit dans une arrière-salle du café Musain, situé sur ce qui est aujourd’hui le boulevard Saint-Michel - ouvert à la fin des années 1850 - non loin de la rue des Grès (partie de la rue Cujas située entre la rue Saint-Jacques et le boulevard). « L’Abaissé c’était le peuple. On voulait le relever. » [4] Les principaux membres de l’ABC sont Enjolras (« angéliquement beau »), Combeferre, Prouvaire, Courfeyrac, Bahorel, Laigle, Grantaire, Joly. La Société des amis du peuple, qui a réellement existé et se réunissait 22 rue des Grès, a servi de modèle à Hugo.
[1] Lieu des amours de Marius et Cosette, la rue Plumet des Misérables est la rue Oudinot d’aujourd’hui, et non pas l’actuelle rue Plumet. C’est fin 1829 que Jean Valjean et Cosette s’y installent.
[2] Situé 50-52 boulevard de l’Hôpital - un numéro qui, même dans les années 1820, n’existait pas - au milieu d’un quartier désolé proche du mur d’enceinte de Paris, ce triste hôtel voit passer la plupart des héros du roman.
[3] Les Misérables, 4e partie, livre 12e.
[4] Idem, 3e partie, livre 4e.
Le nom exact est rue de Picpus à Paris dans le 12e arrondissement. Son histoire est ancienne. Au 16e siècle il y avait de nombreux couvents sur ce territoire. A la Révolution, après le massacre des religieux, fut créé le cimetière de Picpus. Il se visite et contient des tombes célèbres dont celle de Lafayette. Il se situe à une trentaine de numéros avant le 62 où il devait sans doute y avoir un couvent pour lequel Victor Hugo inventa un nom « couvent du petit Picpus » pour son roman « Les Misérables ». Au fil du temps, à cet endroit (60-62) s’installa une œuvre de religieuses, collège-pensionnat pour jeunes filles « Le Saint-Cœur de Marie ». J’y ai vécu et peux vous dire qu’il comportait plusieurs bâtiments, trois cours, une grotte avec une Vierge, une grande et belle chapelle avec une crypte et un jardin potager en plein Paris. Patrick Modiano décrit cette institution dans son roman « A la recherche de Dora Bruder ». C’est par ce livre que j’ai appris sa démolition (dans les années 1970). Maintenant au 60-62 rue de Picpus il y a des immeubles à l’architecture banale… l’urbanisme ne respecte pas l’Histoire. Mais il y a toujours dans cette rue quelques institutions religieuses. Ne parlant pas anglais, suit une traduction automatique faite par un logiciel. Cordialement.
The exact name is street of Picpus to Paris in the 12th district. Its history is former. At the 16th century there were many convents on this territory. With the Revolution, after the massacre of the monks, the cemetery of Picpus was created. He visits and contains famous graves of which that of Lafayette. He is located at about thirty numbers before the 62 where there was to undoubtedly be a convent for which Victor Hugo invented a name “couvent du petit Picpus” for his novel “Les Misérables”. In the course of time, at this place (60-62) a work of nuns settled, college-boarding school for young girls “Le Saint-Cœur de Marie”. I lived there and can tell you that it comprised several buildings, three schoolyard, a cave with a Virgin, beautiful church with a crypt and a vegetable garden in full Paris. Patrick Modiano describes this institution in his novel “A la recherche de Dora Bruder”. It is by this book that I learned his demolition (in the years 1970). Maintaining with the 60-62 street of Picpus there are buildings with banal architecture… town planning does not respect the History. But there are always in this street some religious institutions. Not speaking English, an automatic translation made by a software follows. Cordially
Bravo pour ce site, que je viens de redécouvrir parmi un fatras de "favoris" bien désordonné. Les textes sont agréables à lire. Les photos notamment celles illustrant la promenade dans la région du Puy sont excellentes. Il faut qu’on en reparle.
René