Anton TCHEKHOV à Nice

Le samedi 17 février 2007.

« Pour qui est-ce que j’écris ? Pour le public ? Mais je ne le vois pas et je crois à lui encore moins qu’au domovoï [1]. Il est ignorant, mal élevé, et ses meilleurs éléments manquent de conscience et de sincérité envers moi. Ecrire pour de l’argent ? Mais je n’ai jamais d’argent et le manque d’habitude fait que je suis presque indifférent à son égard. Ecrire pour des louanges ? Elles ne font que m’irriter. »
Tchekhov.

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L’ex-hôtel Beau Rivage, aujourd’hui 107 quai des Etats-Unis.

Tchekhov aime le théâtre comme un enfant. Il est fasciné par l’endroit et l’envers du décor. Enfant, à Taganrog, il écrivait déjà des farces et des drames et les jouait avec ses frères.

Il est aussi auteur de contes et nouvelles, qui lui apportent rapidement une certaine renommée.

Ses pièces sont dans l’ensemble mal reçues par le public ou la censure : Platonov, Ivanov, La Mouette… Mais l’inspiration continue de jaillir chez lui « comme le pétrole du sol de Bakou ».

En France, le théâtre du Vieux-colombier met le premier en scène Oncle Vania en 1919, et c’est surtout après la Seconde guerre mondiale que les pièces de Tchekhov commencent à rencontrer le succès.


Par goût du dépaysement et pour soigner une toux persistante, Anton Tchekhov effectue quatre voyages en Europe, et à chaque reprise il fait étape à Nice.

Son séjour à Nice d’avril 1891 ne dure que quelques jours, celui d’octobre 1894 une petite semaine à l’hôtel Beau Rivage, aujourd’hui 107 quai des Etats-Unis (plaque).

Après Biarritz, trop venteux et pluvieux pour lui, le voici de nouveau à Nice entre octobre 1897 et avril 1898 à l’hôtel "Oasis", 23, rue Gounod (plaque). Cet hôtel, appelé alors la Pension russe, existe toujours. Les chambres n’y sont pas très chères et l’hôtel est une petite colonie russe… qui accueille plusieurs tuberculeux, comme Tchekhov lui-même.

Il pratique un peu le français, apprécie Voltaire et Maupassant et beaucoup moins Zola. Mais l’affaire Dreyfus le range du côté du père des Rougon-Macquart. Tchekhov tente sans grand succès de rallier à sa conviction son ami et éditeur Souvarine, qui combat Dreyfus dans sa revue Temps nouveaux. L’Affaire - qui, comme pour de nombreux autres, entachera leur profonde amitié - lui suggère de longues lettres.

L’écrivain a hâte de voir le printemps à Melikhovo mais doit attendre la fonte des neiges pour retourner en Russie. Il n’a pas très envie d’écrire. La pluie qui le bloque à la pension lui permet cependant de composer Le Petchénègue, De retour, En Chariot.
Il aimerait bien gagner à la roulette pour pouvoir se passer d’écrire. Il achète une roulette avec son ami Potapenko venu le rejoindre, et tous deux étudient son fonctionnement. Lorsqu’ils tentent leur chance au casino de Monte-Carlo, Potapenko perd tout.

Tchekhov quitte Nice le 14 avril 1898.

C’est à la pension russe qu’il revient le 27 décembre 1900 pour y travailler aux deux derniers actes des Trois sœurs. Les deux premiers sont déjà en répétition à Moscou avec la comédienne Olga Knipper, que Tchekhov épouse en 1901.
Comme en avril 1898, il se rend à Monte Carlo pour jouer au casino, mais avec moins d’intérêt. Il quitte Nice fin janvier 1901.

Pendant ses séjours à Nice, sa sœur Macha veille sur la maison familiale de Melikhovo, au sud de Moscou.
Souffrant de plus en plus de la tuberculose, il vend Melikhovo en août 1899 pour s’installer à Yalta, qu’il appelle "l’île du diable" car il n’y a pas de théâtre.

Sources :
- Christian Arthaud, Eric L. Paul, La Côte d’Azur des écrivains, Edisud, Aix-en-Provence, 1999.
- www.russie.net/article.php3 ?id_article=823,
- préface de Roger Grenier au Théâtre complet I, Folio n°393,
- article Tchekhov à la pension russe de Nice, de Virgil Tanase, dans le Figaro du 4/3/2008. En ligne sur www.lefigaro.fr/voyages/2008/03/04/03007-20080304ARTFIG00373-tchekhov-a-la-pension-russe-de-nice.php.

[1] Génie domestique.



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