Charles-Augustin SAINTE-BEUVE

Boulogne-sur-Mer, Paris
Le vendredi 29 août 2003.
JPEG - 208.5 ko
La dernière demeure, 11 rue du Montparnasse.

"L’œuvre de Sainte-Beuve n’est pas une œuvre profonde. La fameuse méthode, qui en fait, selon Taine, selon Paul Bourget et tant d’autres, le maître inégalable de la critique du XIXe siècle, cette méthode, qui consiste à ne pas séparer l’homme et l’œuvre, […] à s’entourer de tous les renseignements possibles sur un écrivain, à collationner ses correspondances, à interroger les hommes qui l’ont connu […], cette méthode méconnaît ce qu’une fréquentation un peu profonde avec nous-même nous apprend : qu’un livre est le produit d’un autre moi que celui que nous manifestons dans nos habitudes, dans la société, dans nos vices. Ce moi-là, si nous voulons essayer de le comprendre, c’est au fond de nous-mêmes, en essayant de le recréer en nous, que nous pouvons y parvenir."
Contre Sainte-Beuve, Marcel Proust.

Tristounet, sage, fin, curieux de tout, tels sont les qualificatifs qui caractérisent le plus souvent Sainte-Beuve. Critique aussi, car à défaut d’être grand écrivain, il est grand critique, peut-être le plus craint de son époque, construisant sa propre méthode qui consiste à comprendre l’œuvre d’un artiste par sa vie, et à investiguer dans celle-ci tel un inspecteur sur le lieu du crime.
Mais, soixante-dix ans plus tard, Proust s’élève vigoureusement contre cette approche dans son passionnant Contre Sainte-Beuve qui montre que, à force de cerner le cadre et d’interroger l’écrivain et son environnement, on rate la pensée intérieure, qui ne se dévoile que dans l’oeuvre.
Contre Sainte-Beuve montre comment lire Balzac, Nerval et Baudelaire avec et sans les yeux de Sainte-Beuve, et la comparaison est instructive.

-  Charles-Augustin naît à Boulogne-sur-Mer, 16 rue du pot-d’Étain, en 1804. Une enfance triste entre une mère et une tante qui gardent le culte du père décédé à la naissance de son fils.
-  La famille s’installe à Paris en 1818. Charles-Augustin est élève dans l’institution Landry, 32 rue Chaptal et au lycée Condorcet. Il va peu à peu vers la lecture de Chateaubriand, Lamartine et des premiers écrivains du romantisme.
-  En 1823, il habite 94 rue de Vaugirard (demeure disparue avec le percement de la rue de l’Abbé-Grégoire). En 1827, il abandonne des études de médecine et commence à composer des critiques littéraires pour Le Globe, créé en 1824, basé 6 rue Monsigny et qui célèbre le romantisme en accompagnant son glissement du monarchisme vers le libéralisme.
Sainte-Beuve écrit en particulier en janvier de cette année deux articles sur Victor Hugo, qui cherche ensuite à faire sa connaissance. Sainte-Beuve se rend chez les Hugo, et, au lieu de trouver Victor, trouve sa femme Adèle… Tout cela fait qu’il devient un ardent promoteur du romantisme et le restera jusqu’en 1840. Il trouve sa place dans le "premier cénacle", qui réunit le dimanche Hugo et de nombreux autres autour de Charles Nodier et de sa fille Marie, à la Bibliothèque de l’Arsenal.
-  Il loge 19 rue Notre-Dame-des-Champs entre 1828 et 1830, non loin du n°11 où vivent alors les Hugo. Sa relation avec Adèle est forte, mais seulement platonique.
-  Le voilà au 4ème étage du 2 passage du Commerce-Saint-André (hôtel de Rouen, qu’il appelle de Rohan), de 1831 à 1841 (plaque). Il y loue deux chambres sous le nom de Charles Delorme, pour échapper au service de la Garde nationale.
Volupté, son unique roman, paraît en 1834, inspiré par ses sentiments pour Adèle et teinté des idées socialistes de Lamennais et Pierre Leroux. S’il lui vaut des éloges de Chateaubriand, de Michelet et d’autres (mais Balzac décide de faire mieux, avec Le Lys dans la vallée), ce n’est pas une réussite commerciale, et Sainte-Beuve décide de ne plus se consacrer qu’à la critique, en particulier pour La Revue des deux mondes.
- Entre 1840 et 1848, il est conservateur de la Bibliothèque Mazarine située dans les bâtiments de l’Institut, où il demeure, 23 quai Conti. Il en démissionne après la révolution de février 1848, inquiet et dégoûté par cette rebellion, et part enseigner quelque temps à Liège.
-  Il habite 5 rue Saint-Benoît, en 1849-51. De 1849 à 1861, il rédige chaque lundi une causerie sur l’actualité sociale et littéraire, d’abord pour Le Constitutionnel puis pour Le Moniteur à partir de 1852.
-  Son adresse est le 11 rue du Montparnasse, de 1851 à sa mort en 1869 (plaque).
À la différence de nombre de ses amis écrivains (mais comme Mérimée, Gautier et Vigny), il se rallie à Napoléon III après le coup d’État de 1851 et devient sénateur en 1865.
-  Au 9 rue Mazet se trouvait le restaurant Magny où, entre 1862 et 1870, dînent deux vendredis soir par mois Sainte-Beuve, les Goncourt, Gautier, Sand, Renan, Flaubert, Taine,…

Autres demeures de l’auteur
Sainte-Beuve a été un invité fidèle, à Saint-Gratien dans le Val d’Oise, de la princesse Mathilde (16 av. du Château).

Petite bibliographie
Les logis de Sainte-Beuve, article de Robert Coiplet dans Demeures inspirées et sites romanesques tome II, par Paul-Émile Cadilhac et Robert Coiplet.
Sainte-Beuve. Michel Crépu, éditions Perrin, 2001.



Forum de l'article

La Rochelambert (George Sand)